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Henri Jules de Bourbon, duc d’Enghien, d’après Pierre Mignard

Découvrez le fils du « Grand Condé », atteint de lycanthropie à la fin de sa vie.

Présentation de l'oeuvre

École française du XVIIe siècle, d’après Pierre Mignard (1612-1695), Henri Jules de Bourbon, duc d’Enghien, 1651. Huile sur toile, 67,5 x 59 cm. Château de Bussy-Rabutin (Bussy-le-Grand)

© Benjamin Gavaudo / CMN

 

Henri Jules de Bourbon (1643-1709) est le fils du « Grand Condé ». Le titre de duc d’Enghien lui est attribué jusqu’à la mort de son père et il se fait ensuite appeler « Monsieur le prince ». Il poursuit une carrière militaire, sans jamais se voir accorder le commandement des troupes, le roi Louis XIV ne se fiant pas à lui. À vingt ans, il épouse Anna Henriette Julie, comtesse palatine, et deviennent parents de dix enfants.

Louis, de petite taille et sans prestance, fait un effet très mitigé à madame de Sévigné au carrousel de 1685 : « M. le duc de Bourbon était-il joli ? de bonne foi comment paraissait-il ? Approche-t-il la taille du marquis [de Grignan] ? Ah, j’ai bien peur que non, je suis triste de voir tant de grandeurs et tant de disgrâces du côté de la taille ». Le portrait qu’en fait Saint Simon dans ses Mémoires fait frémir : « Fils dénaturé, cruel père, mari terrible, maître détestable, pernicieux voisin, sans amitié, sans amis, incapable d'en avoir, jaloux, soupçonneux, inquiet sans aucun relâche, plein de manèges et d'artifices à découvrir et à scruter tout, à quoi il était occupé sans cesse ». Le mémorialiste le qualifie même de « fol ».

Les quinze ou vingt dernières années de sa vie ont été particulièrement difficiles selon Saint Simon : « On disait tout bas qu'il y avait des temps où tantôt il se croyait chien, tantôt quelque autre bête dont alors il imitait les façons; et j'ai vu des gens très dignes de foi qui m'ont assuré l'avoir vu au coucher du roi pendant le prier-Dieu, et lui cependant près du fauteuil, jeter la tête en l'air subitement plusieurs fois de suite, et ouvrir la bouche toute grande comme un chien qui aboie, mais sans faire de bruit ». Ce témoignage laisse à penser que Henri Jules de Bourbon est atteint de lycanthropie, une maladie psychiatrique où le patient se croit transformé en loup.

Le portrait du château de Bussy-Rabutin, acquis par Jean-Baptiste-César de Sarcus au XIXe siècle, présente le prince arborant un jabot de dentelle orné d’un nœud typique de la mode des années 1660. Représenté en buste dans un médaillon, il est vêtu de l’habit militaire, dans une posture qui rappelle celle du peintre Claude Lefebvre, où il figure auprès de son père, Louis II de Bourbon Condé, arborant l’Ordre du Saint-Esprit, ordre de chevalerie le plus prestigieux de la monarchie française. Il le reçoit en 1661.

L’œuvre est une copie d’après un portrait en médaillon de Pierre Mignard, comme l’atteste les estampes de Robert Nanteuil d’après ce tableau (Paris, BnF).  Célèbre portraitiste de la seconde moitié du XVIIe siècle, il peint à de nombreuses reprises les membres de la cour et évolue dans les cercles royaux et de la cour. Ce portrait est aussi celui sert de modèle à Claude Lefevre lorsqu’il peint Louis II de Bourbon Condé et son fils Henri Jules, œuvre conservée au château de Versailles.

 

Gravé par Robert Nanteuil (1623-1678), d’après Pierre Mignard (1612-1695), Portrait de Henri-Jules de Bourbon, prince de Condé. Estampe. Paris, BnF

© BnF

 

Attribué à Claude Lefevre (1632-1675), Louis II de Bourbon Condé et son fils Henri-Jules, 1662-1666. Huile sur toile, 130 x 102 cm. Versailles, château de Versailles

© RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Oeuvre à la loupe

Pour aller plus loin

Katia Beguin, Les princes de Condé. Rebelles, courtisans et mécènes dans la France du Grand Siècle, Paris, 1999.

Jean-Claude Boyer, « Le peintre, le roi, le héros. L'Andromaque de Pierre Mignard », Paris, musée du Louvre, 17 janvier - 23 avril 1990, p. 29.

Lucretia de Planta, « Essai de reconstitution de la collection de Roger de Rabutin, comte de Bussy, au château de Bussy-le-Grand », mémoire de Maîtrise, Paris IV-Sorbonne, 1989-1991 pp. 59-60, 64-66, 69, 72-73.

Jean-Baptiste-César comte de Sarcus, "Notice historique et descriptive sur le château de Bussy-Rabutin", Dijon, 1854 p. 89.

Autrice de la notice

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Morwena Joly-Parvex

Conservatrice du patrimoine

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